Récemment, un couple que j'accueillais pour
la préparation de son mariage me questionne sur mon
parcours. Comment suis-je devenu pasteur ?
J'explique donc que sous la robe du pasteur existe et
bat un coeur d'homme ; que ce coeur a connu bien des
élans, bien des engouements dans sa jeunesse, son
adolescence, et le début de sa vie adulte, mais la foi,
non, pas avant l'âge de 22 ans en tout cas ! Que j'ai
été encore quelques années un " enfant ", au sens où
l'apôtre Paul l'entend, un " enfant dans la foi ", qui
cherche précautionneusement la nourriture spirituelle
qui lui convient pour grandir dans la grâce de
Dieu.
Mines étonnées du couple et étonnement
instantané : " Ah bon ! Mais on pensait qu'il fallait
commencer tout petit pour en arriver là ! ". Je ne
suis ni content, ni mécontent de cet effet. Dieu sait si
cette surprise les aidera à avancer ...
Le baptême ? La question ne m'avait jamais
effleuré, pendant environ 25 ans ou presque. Dans la
première paroisse protestante que j'ai fréquentée, j'ai
rencontré un ami qui, lui aussi, en avait poussé la
porte en chercheur curieux. Une chose parmi d'autres
nous distinguait : une partie de sa famille était
huguenote ! La mienne, catholique ou comptegouttes,
mais surtout athée. Après plusieurs mois de
fréquentation du culte et d'autres réunions
paroissiales, cet ami fut baptisé.
A quelques années près, nous avions le même
âge. Nous étions adultes, et riches tous les deux
d'expériences militantes. J'ai commencé mes études
de théologie, nécessaires à mes yeux pour m'aider à
répondre à toutes les questions qui m'habitaient avant
de demander le baptême. Au moment où je
m'installais sur les bancs de la Faculté, à Strasbourg,
cet acte représentait encore pour moi une démarche
difficile. Je n'étais pas sûr que ma foi corresponde
suffisamment à celle de l'Eglise pour qu'un acte
symbolique me lie à celle-ci.
Mais la petite vie communautaire du
Séminaire Protestant (le Stift), fondée pour moi
sur la prière matinale quotidienne avec d'autres
étudiant(e)s, la fréquentation de différents lieux
d'église, les échanges avec des pasteurs m'ont
conduit à franchir ce pas. La préparation et la
célébration de mon baptême fut un moment
certes intimidant, mais aussi une grande source
de paix, car j'avais fait ce pas qui me liait
(enfin !) à une vaste famille de croyants, qui
m'invitait à rendre compte de ma foi, et à
m'ouvrir toujours plus à l'amour de Dieu et du
prochain.
J'ai été baptisé le 31 mars 2002 au
Temple de Bouclier à Strasbourg, le jour de
Pâques. J'avais déjà un certain bagage
universitaire, et 26 ans révolus. J'étais sûr de ne
pas passer cette fois un examen, mais de saisir
une main tendue, la main de Dieu. Des amis
étaient présents pour m'accompagner ; en guise
de dernière ligne droite dans la préparation,
j'avais veillé presque toute la nuit pour mieux
goûter l'aube de la résurrection. Mes parents,
mon frère et l'une de mes soeurs étaient venus sur
mon invitation : ils découvrirent pour la
première fois un culte protestant qui les séduisit
plutôt, sans bouleverser leur athéisme. Je les ai
beaucoup remerciés d'avoir été là, et ... de ne pas
m'avoir baptisé plus tôt, sinon je n'aurais pas
vécu aussi pleinement ce pas vers le Christ !
Chaque année, cette fête de Pâques me
rappelle que je suis mort à moi-même, et
ressuscité avec lui par le baptême.
Julien-Nathanaël Petit Pasteur à Guebwiller
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